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L. L. Boilly, Jean qui rit,
Boston, Museum of Fine Arts |
Le Palais des Beaux-arts de Lille commémore le 250e anniversaire de la naissance du peintre et dessinateur Louis Léopold Boilly (né le 5 juillet 1761 à La Bassée, village situé à une vingtaine de kilomètres de Lille – mort en 1845 à l’âge respectable de 83 ans) par une magnifique exposition rétrospective.
Environ 200 œuvres (peintures, dessins et gravures) sont présentées dans un ordre chronologique et également par thématique.
En préambule, l’exposition propose une série de « petits portraits », exécutés avec rapidité et captant avec brio les traits et la psychologie du modèle. Exécutés en grand nombre, les spécialistes en dénombreraient plus de 5.000, ces tableaux de petits formats, accrochés de manière rapprochés, ont établi la réputation de l’artiste.
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L. L. Boilly, Portrait d'Edouard Boilly
Paris, Musée du Louvre,
Département des Arts Graphiques, RF 30666
(@site Joconde) |
C’est ensuite la figure du peintre, son environnement familiale et son cercle d’amis qui sont abordés. L’autoportrait de l’artiste en Jean qui rit, exécuté au crayon noir et rehauts de blanc, conservé au Museum of Fine Arts de Boston est exceptionnel. En le regardant, le spectateur aura probablement envie de « répondre au dessin » par un sourire. Sur un papier brun de beau format, les Portraits des huit membres de la famille Chenard sont de grandes qualités et le traitement de chacun est des plus intéressants à détailler. Dans une vitrine, le Portrait d’Edouard Boilly, miniature en grisaille sur porcelaine, dégage une immense douceur enfantine.
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L. L. Boilly, L’Indiscret,
Musée Cognacq-Jay |
Entre 1785 et 1791, les scènes de genre de Boilly rencontrent un immense succès. Pour la plupart en intérieur, elles représentent souvent une scène galante parfois grivoise où les sculptures à l’arrière-plan jouent un rôle important et où l’influence de l’Age d’or hollandais est évidente. On mentionnera en autre L’Indiscret, conservé au Musée Cognacq-Jay.
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L. L. Boilly,
L'Atelier d'une jeune artiste
Moscou, Musée Pouchkine |
Après la salle sur la «Tourmente révolutionnaire», celle sur les «débuts de la célébrité» de Boilly entre 1795 et 1804 propose notamment le thème récurrent de l’atelier d’artiste. Deux tableaux se distinguent notamment pour leur grande minutie mélangée à une douceur exceptionnelle : L’atelier d’une jeune artiste conservé au Musée Pouchkine de Moscou et La Peintre dans son atelier du musée de Schwerin, où dans un contexte familiale une jeune femme peintre, assise, portraiture un jeune garçon qui semble distrait.
De nombreuses toiles représentent le sculpteur Jean-Antoine Houdon dans son atelier modelant le buste de divers modèles. Boilly, peintre illusionniste, aime figurer en deux dimensions la ronde-bosse.
Quant à la célèbre toile sur une Réunion d’artistes dans l’atelier d’Isabey conservée au Musée du Louvre, elle est entourée des dessins préparatoires et esquisses de chacun des personnages !
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L. L. Boilly, L’entrée au jardin Turc,
Los Angeles, J. Paul Getty Museum,
Image courtesy of Christie´s Images Ltd 2010. |
Les peintures exposées dans la salle intitulée « L’Empire et la Gloire, 1804-1814 » sont celles que l’artiste exposa aux Salons de 1804, 1808 et 1812, où il remporta un franc succès. L’artiste commence à décrire des scènes quotidiennes de la rue avec une maitrise de la foule et une technique porcelainée. On aimera les Scènes de boulevard et L’entrée au jardin Turc inspirées des scènes foraines de Teniers et de la modernité naissante en ce début du XIXe siècle.
Dans le tableau L’arrivée d’une diligence dans la Cour des Messageries, conservé au Musée du Louvre, on remarquera un détail cocasse, celui de la nourrice mouchant une petite fille avec la robe de la jeune femme embrassant son mari.
Durant les années de la Restauration, la fascination de Boilly pour la foule évolue. Désormais, c’est l’expression des passions et des caractères, reflets de la nature humaine, qui l’intéresse. Dans L’Entrée du théâtre de l’Ambigu-Comique à une représentation gratis, les visages expriment l’effroi de la bousculade et de la compression, chacun tenant absolument à pénétrer dans le théâtre. Ce thème des bousculades et bagarres populaires est repris dans Les Femmes se battent, conservé au Musée de Boulogne-sur-Mer.
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L. L. Boilly
Christ en ivoire crucifié à une croix en bois
coll. particulière
@art value.com |
La dernière partie de l’exposition porte sur « l’art de l’illusion, du trompe-l’œil et de la caricature » techniques parfaitement maîtrisées par Boilly. Epoustouflant est le trompe-l’œil du Christ en ivoire crucifié à une croix en bois. Le petit papier blanc sur lequel l’artiste appose sa signature et son adresse qui semble partiellement collé est inspiré des Maîtres vénitiens du XVIe siècle.
Le Trompe-l’œil dit de la collection de dessins avec Boilly et Elleviou semble réellement avoir une vitre cassée. Le spectateur a envie de tendre la main pour s’en assurer … d’ailleurs, l’autoportrait de l’artiste en bas à gauche qui le regarde d’un air moqueur, heureux de sa plaisanterie qui fonctionne est visiblement un pied de nez de Boilly !
L’artiste imite aussi bien les bas-reliefs en terre cuite comme la Bacchanale d’enfants avec une chèvre, copie d’une œuvre de François Duquesnoy, que le bois et la paille comme l’arrière-plan du bas-relief du Triomphe d’Amphitrite, ou que l’estampe. En effet, Boilly a peint de nombreux tableaux en grisaille « à l’imitation de l’estampe ». Il simule également les inscriptions en bas de celle-ci tel « Boilly pinx. », ou un titre « ah ! ça ira ».
Voici donc une belle exposition dont le catalogue est riche en information et illustration des œuvres !
Clara Dudézert
Palais des Beaux-Arts
Place de la République
59000 Lille
Tel. 00 33(0)3 20 06 78 00
Fermé le mardi. Ouvert le lundi de 14h00 à 18h00, le mercredi, le jeudi, le vendredi, le samedi et le dimanche de 10H00 à 18H00.